Filtrer
Support
Éditeurs
Cornelius
-
Le Rayon de la mort est le dernier opus de la série Eightball, dans laquelle Ghost World et Art School confidential ont vu le jour. On y retrouve les thématiques fétiches de Clowes, à savoir un mélange de parade éloquente et d'aliénation poignante tout en retournant brillamment les codes du superhéros. Selon les codes du genre, Andy, un adolescent orphelin et solitaire, acquiert des super pouvoirs, non pas au cours d'une expérience de chimie mais à force de tirer sur sa cigarette. Armé de sa prouesse dévastatrice et du rayon éponyme, notre héros prépare sa vengeance envers ses ennemis. Tandis que les héros de bandes dessinées ont tendance à habiter les grandes métropoles grouillantes de criminels et de criminologues, le monde où vit Andy est plus proche du nôtre, sans robots ni aliens, mais avec ses rivalités minables et ses arrangements mesquins. Face à une pénurie de vrais méchants mais hanté par un terrible désir de vengeance, Andy fait avec ce qu'il a sous la main : un assortiment de petites brutes, d'ersatz de rebelles et de jeunes losers. « À quoi bon avoir un pote avec des super pouvoirs, si on ne trouve même pas de criminels à buter ? » se plaint Louis, l'acolyte d'Andy.
Allusion acide à la politique étrangère américaine doublée d'un sens aigu de l'ennui chez les adolescents, Le Rayon de la mort trahit la profonde affection de Dan Clowes pour les comics doublée d'une vive envie d'en déconstruire les codes.
-
Avec Wilson, Clowes revisite sa thématique fétiche à savoir la médiocrité humaine, la portant à un nouveau degrée d'excellence. Une série d'histoires d'une page retrace les efforts de Wilson pour reprendre sa vie en main avant de replonger dans sa déprime quotidienne. Tel Sisyphe poussant son rocher, notre héros sue sang et eau pour remonter la pente avant de se casser le nez et de s'en retourner à la case départ.
Abordant des inconnus au café, dans la rue, dans le bus, s'incrustant en famille ou chez ses accointances, Wilson essaie désespérément de renouer le contact avec ses contemporains. Après la mort de son père, Wilson, irrévocablement seul, se lance à la reconquête de son ex-femme, Pippi, dans l'espoir de raviver la flame de cette relation éteinte depuis bien longtemps. Ce faisant, il découvre sa fille Claire, née peu après leur separation et placée dans une famille adoptive. Prêt à tout pour reconstruire une famille, Wilson se donne pour mission de les réunir tous les trois - encore un projet voué à l'échec et qui ne manquera pas de se retourner contre lui.
Clowes utilise une variété de styles pour dessiner son personnage, mais qu'il apparaisse sous des traits parfaitement réalistes ou sous la forme d'un cousin éloigné d'Andy Capp, Wilson reste définitivemet un loser.
Avec ce nouveau livre, Clowes nous offre une tranche de pessimisme brillamment découpée et magnifiquement dessinée. À l'heure où les bons sentiments sont légion, il fait bon de lire ce chef d'oeuvre remarquable de misanthropie.