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Mathieu Lindon
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«La littérature était l'instrument de son pouvoir, puisque les auteurs étaient si fiers d'être les siens. Ils n'auraient pas demandé mieux, à certains moments, qu'il dise "mes auteurs" comme eux "mon éditeur". Il était comme un roi mais de par la volonté de ses sujets.» Mathieu Lindon raconte son père, Jérôme Lindon, directeur emblématique des Éditions de Minuit de 1948 à 2001. Au roman intime se superpose celui de la légendaire maison et de sa «famille d'auteurs», dont Sam (Samuel Beckett), Alain Robbe-Grillet, Marguerite Duras, Jean Echenoz et beaucoup d'autres. De l'Occupation à la naissance du nouveau roman, de la dénonciation de la guerre d'Algérie aux prises de position en faveur de la Palestine, le fils, devenu écrivain, fait revivre un demi-siècle de combats littéraires et politiques.
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« Et toi, ça ne te gratte pas ? »
Voici le récit d'une compulsion à la fois familière, irritante, et forcément involontaire. Qui nous prend depuis la toute petite enfance et jusqu'aux dernières extrémités de la vie. Qu'est-ce que ça nous fait, la démangeaison ? Qu'est-ce que ça dit de nous-même, de notre relation au corps, à l'esprit, aux autres et à l'existence ? Mathieu Lindon nous propose un texte étourdissant, drôle, caustique et vertigineux, sur notre condition humaine à travers l'interrogation « de ce qui nous gratte », en suivant les pensées de nos démangeaisons multiples. Il rejoint, avec humour, la question philosophique du « monde comme volonté et représentation » (Schopenhauer). La démangeaison devenant l'acte mystérieux de la question de l'être, nous mettant au défi de notre volonté : « Quand la volonté est déviée de sa route, quand on aimerait bien vouloir autre chose mais on veut ça avec une intensité qu'on souhaiterait à d'autres souhaits. » C'est poser alors la question de notre libre arbitre : être maître de se gratter ou pas et aux instants choisis. Et être soi, comme bénédiction ou malédiction.
C'est aussi un texte sur le langage, les expressions diverses par lesquelles nous exprimons ce désir impérieux et embarrassant, la gêne et le soulagement, à la fois physique et moral, que trahit la démangeaison dans la langue. Que sommes-nous d'autres que des « singes gratteurs » ? Et que serions-nous si personne ne saisissait ce qu'est un picotement et une démangeaison, s'il n'y avait pas de mots pour les dire ? « Ça te gratte ? Gratte-toi ou laisse faire ? La barbarie ou la civilisation ? Le ridicule de chaque idée poussée à son terme, radical, radicule. Rire un instant, si souvent il y aurait de quoi se gratter le cerveau jusqu'au sang. Mais le sien propre, on n'est pas sur Terre pour gratter les autres. Ou est-ce dans ce but qu'on pollue cette planète ? On s'échine parfois à être poil à gratter quand il serait plus utile d'être pommade anti-démangeaison, doigts offerts aux plus nécessiteux, aux dos inaccessibles et autres épuisés ne demandant qu'à se reposer, immobiles jusqu'au bout des phalanges. » -
«Vous êtes puni, Hervé Guibert?» l'abordai-je alors qu'il se tenait à l'écart lors d'une petite réception, et nous devînmes amis.À la fin de sa vie, nous nous sommes retrouvés ensemble un an durant, en fait deux, à la Villa Médicis, à Rome.Je n'ai pas l'ambition de raconter toute notre amitié - mais ces années romaines, soudain, oui.M. L.
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«En vérité, la proximité la plus grande que j'aie eue fut avec Michel Foucault et mon père n'y était pour rien. Je l'ai connu six ans durant, jusqu'à sa mort, intensément, et j'ai vécu une petite année dans son appartement. Je vois aujourd'hui cette période comme celle qui a changé ma vie. Je suis reconnaissant dans le vague à Michel, je ne sais pas exactement de quoi, d'une vie meilleure. La reconnaissance est un sentiment trop doux à porter : il faut s'en débarrasser et un livre est le seul moyen honorable, le seul compromettant. Quelle que soit la valeur particulière de plusieurs protagonistes de mon histoire, c'est la même chose pour chacun dans toute civilisation : l'amour qu'un père fait peser sur son fils, le fils doit attendre que quelqu'un ait le pouvoir de le lui montrer autrement pour qu'il puisse enfin saisir en quoi il consistait. Il faut du temps pour comprendre ce qu'aimer veut dire.»
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- Pourquoi écrivez-vous ? - Ma foi, c'est une question difficile. Pourquoi, en effet ? Est-ce dû à ce que jadis on appelait l'inspiration et que je préférerais nommer une nécessité, une force venue du fond de moi, de tout ce que j'ai senti et vécu et que je me crois capable de ressusciter et d'étendre ? - Pourquoi écrivez-vous ? répète la juge, écartant d'un geste agacé de la main les balivernes précédentes. J'ai tout mon temps.
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«L'héroïne apporte sa dose de lucidité : il voit maintenant sans problème l'addiction dans les vies qui l'environnent, à l'amour, au sexe, à la famille, au boulot, aux conventions, et, fort de cette découverte, en arrive à compter pour rien sa dépendance à un réel stupéfiant, de même qu'un alcoolique peut passer son ivresse à compter ce que s'envoient ses confrères de beuverie. Il se pique que sa conscience de la réalité le débarrasse de la réalité. Qu'elle reste à sa place, la réalité, qu'elle ne la prenne pas tout entière.» Perrin a fort à faire avec l'héroïne.
Elle le contraint à une lucidité. Il voit l'obscénité de toute vie, développe une compétence pornographique.
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C'était la nuit et je pensais à Jim-Courage, je pensais que je l'aimais, bien sûr je l'aimais, et je ne savais pas si j'étais triste ou joyeux : j'étais ému.
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Qui, quoi vaincre pour devenir le plus grand tennisman de sa génération ? Kylh, joueur vieillissant, apparaît un jour dans la vie de Ximon pour aider le gamin à réaliser son rêve. Et cet étrange couple se met au travail : entre l'adulte malade du sida et l'orphelin avide d'offrir le meilleur de soi naît une affection qui les dépasse l'un et l'autre mais dont chacun sent qu'elle sera à jamais la principale arme de Ximon. C'est par elle qu'il apprendra à gagner ou à perdre chaque match qu'il dispute, y compris la finale de Wimbledon. - Sais-tu seulement ce qu'il te faut pour être, ne serait-ce qu'un instant, champion du monde ? dit Kylh. - L'être à chaque instant, non ? dit Ximon. Mais est-il capable à chaque instant d'être champion du monde de courage, de générosité et d'amour ?
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« Je suis un artiste. Je suis ma prison et ma liberté, mon intelligence et ma connerie, mon courage et ma lâcheté. Je suis un artiste de la haine, comment faire autrement ? Vous rêvez de m'isoler mais je suis un artiste, je reste dans mon coin en plein milieu de chez vous, en plein milieu de votre chambre et de votre tête et de votre sang. Je suis un contre tous et je vous contamine parce que j'apporte ce contre quoi vous n'êtes pas immunisés, n'ayant jamais eu de rapport avec, l'intelligence, le courage, la beauté. ».
Une voix s'élève, hurle, se répète, conspue, invective et injurie. Seule contre tous. Monologue effrayant de violence qui s'en prend à l'Autre, à tous les autres, aux cons. Ce texte limite, à la fois cruel, drôle, scandaleux, fait penser à Thomas Bernhard, mais aussi à Céline, ou encore à Dostoïevski quand la voix rappelle que « la condition humaine (est) bâtie contre l'humanité ». Ou encore : « Vous êtes impitoyables car vous avez mis votre pitié en commun et elle est toute destinée à vous-mêmes sans que vous vous en rendiez compte. » Qui est cet « artiste de la haine » ? Celui qui en nous dénonce « l'horreur du genre humain », espère autant qu'il craint une solitude radicale, et vacille de terreur et de rage devant la bêtise universelle. Texte exutoire, d'un humour féroce, qui tente un impossible règlement de comptes avec l'humanité et les autres. Chaque lecteur se sentira à la fois visé de façon insupportable et tout autant reconnaîtra les accents libérateurs de sa propre haine, de sa propre détresse.
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Ca y est, à nouveau il est un enfant. Il veut s'accaparer celui qu'il a été. Cette fois-ci, l'enfance est une décision. Comme si un enfant l'attendait dans une grotte, protégé du monde et du temps depuis toutes ces années. Avec ses trésors et ses naufrages, il est ce voilier qui flotte à tout vent. Armé de souvenirs, de sensations retrouvées qui s'agglutinent, fidèles et infidèles, il sera à jamais cet enfant-là, dorénavant. A quoi ça sert, l'enfance ? On tombe là-dedans pour y faire quoi ? Etre un enfant, c'est comme être un dinosaure, ça remonte si loin. Il veut devenir ce paléontologue contaminé par son objet d'étude à qui son âge n'interdit pas d'écrire pour de vrai l'autobiographie de celui qui pourrait aussi bien être son fils que son père.
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« Il était une fois moi, croyez en moi, s'il vous plaît, qui que je sois. » Le nouveau livre de Mathieu Lindon est une exploration littéraire de nos tentatives souvent désespérées, parfois drôles, cruelles, absurdes, de donner un sens à la vie, de formuler une proposition logique à tout ce que nous sommes, qui que nous sommes, et à ce que nous vivons ou pas. Comme dans un roman policier, ou comme dans un conte de fées (« Imagine le carnage si tous les voeux se réalisaient »). La logique déferle sur le monde, et dans la vie : « cauchemar ou conte de fée ? » demande le narrateur.
Ainsi dans une première partie, Contes de fées et autres romans d'amour, le lecteur affronte une série de situations ou de questions pour en juger les conséquences : une odeur nauséabonde autour de nous, l'annonce de la mort de quelqu'un, s'interroger sur l'inutilité récurrente de son sexe. Dans un texte sui- vant, un curieux prédicateur nous propose de « Faire de son cul une oeuvre d'art ». Quelles répercussions sociales, érotiques possibles à attendre d'une telle proposition ? Dans L'enquête, on assiste avec humour à la déconstruction romanesque d'une enquête policière. Pour se raconter, et nous raconter, Mathieu Lindon s'empare de nos désirs, fantasmes, envies, répulsions, maladresses, et pousse la logique à bout pour défaire l'ordre convenu de nos existences.
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Comment combattre efficacement Jean-Marie Le Pen ? Le jeune Ronald Blistier, membre du Front national, a commis de sang-froid un crime raciste, tuant en pleine rue un adolescent arabe. L'affaire a provoqué maintes indignations et tout le monde est d'accord pour faire du procès Blistier celui de son mentor.C'est un avocat juif de trente ans, maître Mine, qui défend l'assassin. Il a des idées pour mieux lutter contre Jean_Marie Le Pen.- Tendre un piège à Le Pen ? Mais on tombera tous dedans, lui dit pourtant Mahmoud Mammoudi, son compagnon.Pierre Mine, quoi qu'il en soit, a engagé la lutte. Son jeu est indéchiffrable. Ne devient-il pas la cible d'antiracistes et l'étendard de ceux qu'il souhaite combattre ? Jean-Marie Le Pen feint de lui rendre hommage. Diverses tempêtes déferlent sur sa vie, comme si ceux qui luttent sans succès évident contre le Front national trouvaient cependant suspect que quelqu'un d'autre essaie une méthode différente.
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«Un curieux homme est venu me vanter ma propre peur, il prétendait m'aider à la maîtriser pour que j'en profite mieux, un homme jeune, séduisant. Il a mis en cause jusqu'à mes genoux. Je n'ai pas exactement compris ce qu'il me proposait. Une expérience ? Une affaire ? Une religion ? Mais j'ai marché avec lui, victime ou complice. Je crois bien que j'ai tâché de marcher avec lui aussi loin que possible.»
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Le vomisseur, c'est le narrateur. Il vomit tout, cinq milliards d'êtres humains, leur vie, leur mort et leur vocabulaire. Se croyant différent il se souvient - mais est-ce vraisemblable? - du ventre de sa mère, comment c'était là-dedans, lui et son jumeau qui n'en est jamais sorti. Quant à Yucca, Vietnamienne naguère aimée et aimante, elle aussi aura son compte étrangement réglé. Comme Pierre, jumeau d'élection, joli corps. L'homme qui vomit trouve n'avoir rien à faire sur la même planète et ne serait-ce pas pourquoi il vomit? Pour se sortir de soi-même, diminuer petit à petit jusqu'à ce que tout d'un coup il y arrive, disparaisse, inexistant comme aux plus chauds jours?
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Mathieu reçoit une curieuse lettre lui enjoignant de contacter sans délai la fille d'un de ses meilleurs amis, qui vient de mourir. Or, de cet ami, il n'a aucun souvenir. Mais, en même temps que sa méfi ance, sa curiosité est piquée et il se rend en province auprès de l'étrange famille de son « ami ». Tandis que lui revient peu à peu la mémoire, tandis qu'il s'émerveille des personn es qui l'entourent et qui dessinent une constellation d'intelligence et de gentillesse rare - des enfants quasiment surdoués dans ces deux domaines à leurs affables parents - un malaise cardiaque l'abat. Il survivra m ais aura approché de si près la mort que cette histoire en sera elle aussi transfigurée.
Mathieu Lindon poursuit avec cet étrange livre un itinéraire romanesque hors du commun. Tout en ne négligeant pas les ressorts dramatiques classiques, il arrive toujours à introduire dans ses histoires, de manièr e discrète et efficace, un ferment de doute, à montrer doucement que rien ne va jamais de soi et à déborder ainsi, à excéder les cadres ordinaires de la fiction. Cela tient à une phrase très partic ulière, toujours au bord du déséquilibre et d'autant plus fascinante. Cela tient à une pensée qui ne se satisfait jamais des clichés, qu'ils soient politiques, sociaux ou sentimentaux.
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«C'était inattendu, que des employés d'un prestigieux transporteur aérien s'enfuient de leurs comptoirs d'Orly en abandonnant la clientèle pour cause de rumeur d'alerte à la bombe. J'avais une si haute idée d'elle que j'attendais, pour le moins, les excuses de la compagnie, mais elle nia toute responsabilité au mépris des faits. Alors je me suis senti enragé, d'autant plus humilié que je me voyais sans recours face à la force d'une lâcheté et d'un mesonge assurés de l'impunité. Sans recours, vraiment?»
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« Je tombe amoureux d'un garçon venu vers moi pour qu'on couche ensemble et qui, soudain, ne veut plus.
Une histoire d'amour m'est un roman policier. Il s'avère immanquablement que rien ne s'est passé comme je croyais. Le vrai coupable est toujours un coup de théâtre et le mobile par-dessus tout. Il y a toujours un meurtre. Qui est mort pour moi et pas pour les autres ? Qui ai-je tué ? qui me tue ? Tout à coup, je m'incarne en Sherlock Holmes ou Hercule Poirot et, d'un détail d'abord indifférent, reconstruis une histoire complètement différente. Ah, c'est pour ça que tu as fait ça. Je n'avais rien compris, je ne goûtais que le plaisir de la lecture alors que je me croyais au plus près de ma propre vie.
Une histoire d'amour m'est un roman d'espionnage. L'autre est sans cesse à décrypter, il est un déséquilibre que je tâche de figer, d'où le suspense permanent, qui le premier sera traître à la relation ? Qui le premier cessera d'être un agent double, rompant l'égalité proclamée entre l'autre et soi pour revenir à une charité mieux ordonnée ? Rien n'est écrit. Les souvenirs deviennent des armes. Chaque lettre est anonyme car je ne sais jamais qui vraiment l'a écrite, tout est à interpréter.
Une histoire d'amour m'est un roman de gare, un roman d'horreur, je ne sais jamais pour où je pars, avec qui. Ça tourne mal mais un cauchemar, c'est quand même un rêve. »
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Tout le monde. se souvient du célèbre Je me souviens de Georges Perec ou de celui de Joe Brainard (I remember). Mais il est peut-être une autre manière de se décrire, en creux, en angle perdu ou mort, et c'est d'essayer de faire remonter à la surface ce dont on NE se souvient PAS. Dite comme ça, cette proposition paraît futile, ou légère, ou même un peu niaise. En fait il n'en est rien et le travail que cela nécessite est intense et, ici, littérairement enthousiasmant. Cela met en jeu une sorte d'autobiographie modeste, spéculative et méticuleuse mais irrémédiablement fl oue. Qu'on en juge par les premières pages de ce livre si déconcertant :
« Je ne me souviens pas du vase de Soissons. Que je suis allé à l'école, oui, naturellement je me le rappelle, quoique pas dans le détail. Que j'y ai appris des choses, je veux bien le croire. J'étais un as en arithmétique.
Mais qu'il fut un temps où j'ignorais que Louis XI utilisait ses fi llettes en toute immoralité, que Saint-Louis ren- dait la justice sous un arbre et que Louis XVI a été guillotiné, ça semble invraisemblable et c'est pourtant une évidence inattaquable. Que, dans le cas de l'auxiliaire avoir, il faut accorder avec le complément d'objet direct situé avant le verbe, que pour ce qui ne se produira que dans l'avenir on doit employer le futur alors que l'imparfait s'impose souvent pour le passé, que, dans la majorité des cas, un s signale le pluriel des substantifs et des adjectifs même s'il y a pléthore d'exceptions, aussi diffi cile à imaginer que ça puisse aujourd'hui me paraître, il m'a également fallu l'apprendre. Je ne me souviens pas qu'il y eut un moment où j'errais, analphabète, insou- cieux du monde intellectuel et de la civilisation. Le vase de Soissons, je ne me souviens pas si j'ai appris son existence au lycée ou dans ma famille. Il est un événement collectif que je peux partager avec tous les Français.
Si je ne cherche pas à me documenter, j'ai ceci en tête : après la prise ou le sac de Soissons, Clovis guignait tel vase qu'un autre lui refusa, arguant que la communauté était la règle et le vase aussi partageable que l'enfant à la mère indécise présenté devant le roi Salomon. Rage impuissante de Clovis puisque nul Salomon n'empêcha l'étripage du vase. Là-dessus, des années plus tard, à la suite de circonstances redevenues inconnues pour moi, le roi des Francs se venge de l'autre, lui coupant la tête, le tue en tout cas, en prononçant la fameuse phrase dont il serait un peu fort que je ne me souvienne pas.
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« Partir ou rester, telle est la question que tout le monde se pose quand elle n'a pas déjà été résolue. La direction et les syndicats ont négocié, suite au changement d'actionnaire majoritaire, une clause de cession qui permet de quitter le journal avant le 28 novembre avec comme indemnités un mois de salaire brut par année de présence, sans limitation, ce qui doit donner aux plus anciens une excellente raison de partir d'eux-mêmes. Il y avait une prime supplémentaire de douze mille euros pour ceux qui déposaient leur demande avant fin octobre, certains l'ont saisie et le journal se vide. » Ce fragment tiré d'une des premières pages du nouveau livre de Mathieu Lindon en montre bien le cadre, et les enjeux. Il s'agit d'un journal intime qui raconte les quelques semaines de crise d'un Journal d'un autre type, public celui-là, « Libération ». Mathieu Lindon hésite. Partir, rester, le tentent également. Il réfléchit, suppute, hésite, ce qui est pour lui l'occasion de se remémorer « Les Jours de Libération » de son entrée il y a plus de trente ans à aujourd'hui, tout en tenant la chronique précise, drôle, paradoxale, lucide ou émue des événements quotidiens : l'attitude des uns et des autres, les rumeurs, les départs que l'on regrette et les autres, les espoirs et les regrets, le journal qui doit continuer de paraître malgré les avanies réelles ou supposées, des pannes d'ascenseur aux menaces de déménagements dans des banlieues lointaines. C'est ainsi, au jour le jour, au passé et au présent, le fonctionnement d'un journal, et pas n'importe quel journal comme on sait. C'est aussi la vie dans ce journal de l'un de ses plus emblématiques collaborateurs, et l'évocation de quantité d'autres, de Serge July, son fondateur, aux plumes les plus prestigieuses, celles qui ont su créer « l'esprit Libération » . « L'esprit Libération » qui anime ce livre de Mathieu Lindon, fait d'indépendance d'esprit, de non-conformisme, de remises en question continuelles, d'inventivité a marqué durablement, continue de marquer notre temps. Le journal tenu par Mathieu Lindon s'étendant du 7 novembre 2014 au 6 février, il comporte le récit des événements du 7 au 11 janvier 2015 tels qu'ils sont vécus par le narrateur comme par le journal : un autre document à l'intérieur de ce document irremplaçable sur la liberté de la presse.
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Où on voit la guerre séparer Prince et Léonardours et les deux héros vivre chacun mille aventures, courir dans la forêt, dormir dans un arbre, fuir à vélo, s'évader, trahir et être fidèle, rencontrer d'autres garçons, dépuceler un enfant gentil, tester malgré soi de nouveaux instruments de torture, risquer d'être bavard, tout sacrifier, oublier la couleur des yeux de l'adoré - jusqu'à ce que, toujours amoureux, peut-être ils se retrouvent.
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De manière inattendue puisqu'on le prétend un ermite, jesper thorn se rend à un colloque organisé en son honneur à besançon.
Mais le grand écrivain suédois s'y conduit avec une ironie et une violence qui dépassent la goujaterie. " pourquoi écrit-il. pourquoi écrit-il ce qu'il écrit ? et pourquoi est-il venu en parler à besançon ? " ces questions quasi théoriques d'universitaires et de simples lecteurs prennent dès lors une allure plus concrète. un biographe, fou de sherlock holmes, enquête sur lui de façon policière, recrutant une détective en suède, essayant de remonter dans l'existence de l'écrivain et de retrouver la trace d'un amour perdu sur lequel il ne s'est jamais exprimé.
Grâce aux déductions, intuitions et bêtises de ses héros, la littérature, qui contient des extraits des propres chefs-d'oeuvre de jesper thorn, résoudra les mystères apparemment les plus inaccessibles.