L'Italie n'existe pas encore lorsque le Grand Masten parvient à acquérir, à force d'acharnement et de travail, quelques terres à Moncalvo, un petit bourg du Piémont, à la fin du XVIII e siècle. Maintenant qu'il est enfin propriétaire, il fait ériger sur deux étages une grande maison destinée à abriter les générations à venir. Au fil des ans, celles-ci assisteront au va-et-vient de ceux qui traversent la plaine du Pô, les armes à la main. L'armée de Bonaparte, menant tambour battant sa campagne d'Italie, en 1796. Les Autrichiens, déterminés à s'approprier les territoires qui vont de la Vénétie au Piémont, en 1848. Et enfin, le roi du Piémont, Victor Emmanuel II, décidé à réunir les États de la Péninsule en un seul et même royaume. Bientôt roi d'Italie, il inscrira une nouvelle nation sur la carte du monde. Pendant ces décennies cruciales, dans la maison jaune du patriarche et sur les routes de poussière environnantes, Pidren, le Giaï, Maria, Luis, Gavriel, Teresa, Pietro Giuseppe et les autres déroulent leurs vies entre dur labeur et ambitions têtues, amours et tensions, chagrins et bonheurs, au rythme des soubresauts de l'Histoire.
Années 30. De graves événements secouent le monde : crise économique, ébranlement des démocraties, montée de la violence... Pourtant, la vie se déroule encore paisiblement dans une famille de la bonne bourgeoisie romaine. Lorsqu'une petite fille naît, en 1931, elle est escortée par les siens à la Basilique Saint-Pierre pour y être cérémonieusement baptisée. Dans le bel appartement où on la ramène, tout est serein et le restera encore pendant quelques années. La gouvernante allemande accompagne les enfants dans les jardins de la Villa Borghese, la cuisinière Italia prépare des tartes aux fruits, et les voisins échangent des politesses. Pourtant lorsque la fillette rentre à l'école primaire, en 1938, quelques mots captés ici et là fissurent son univers si lisse. Le mot « juif », prononcé avec réprobation ou apitoiement. Le mot « interdit », qui empêche le petit garçon de l'étage supérieur, Giorgio Levi, de prendre l'ascenseur ou le médecin de famille, le Dr Luzzati, de venir l'ausculter.
Tandis que la si gentille voisine de palier, madame Della Seta, se terre dans son appartement silencieux, un mal-être palpable flotte dans l'immeuble...
En 2001 et en 2005, deux faits divers bouleversent l'Italie. Dans le premier, à Novi Ligure, une adolescente, aidée de son petit ami, a poignardé sa mère et son petit frère. Un crime d'une extrême violence puisque le jeune frère a reçu quarante-quatre coups de couteau. Le second s'est déroulé à Erba : quatre personnes, dont un bébé de deux ans, sont mortes égorgées par un couple du même immeuble qui les jugeait trop bruyantes. Rosetta Loy a donné un cadre littéraire à ces affaires sanglantes : la violence réelle de ces deux crimes lui rappelle en effet la violence symbolique des contes des frères Grimm. Ces deux histoires deviennent sous sa plume deux contes - « Le Pays du Chocolat » et « Herbier » - qui dessinent aussi le portrait en creux d'une Italie mal connue : le Nord-Ouest, Piémont et Lombardie, ces régions riches qui votent en masse pour la Ligue du Nord, le parti xénophobe actuellement au gouvernement.
Une mère et une fille qui ne se rencontrent jamais suivent des orbites concentriques mais lointaines, entraînant lieux, destins, hommes et aventures divers, se reconnaissant dans deux histoires différentes, deux façons de concevoir la vie - et son récit. Une mère oublieuse et sauvage, prompte à jouir de l'amour et des choses ; une fille amère et malheureuse, pour qui approcher la réalité, c'est d'abord le faire par l'esprit.À travers ces deux destins, ces deux narrations, Rosetta Loy esquisse le portrait d'une génération, celle de l'immédiate après-guerre, «génération, commente le critique Cesare Garboli, de gamins éternels, immatures et séniles, sages et vains, intelligents et naïfs, pleins de sagesse et privés de consistance. Personnages ombreux auquel le roman donne vie sans jamais porter de jugement, se limitant à les montrer dans leur impossibilité de vieillir.»
Ce court récit se déroule sur un temps très resserré, à peine un mois et demi en août-septembre 1943. Période historique tragique pour l'Italie : les Américains ont débarqué en Sicile au printemps et remontent peu à peu la péninsule, chassant les populations vers le nord ; pour la première fois le pays connaît les bombardements, le rationnement, les représailles. Jusqu'à la date historique du 8septembre 1943 où Mussolini est démis de ses fonctions de Duce par le Grand Conseil fasciste.
La famille de Rosetta Loy a réussi à quitter Rome et s'est repliée en Vallée d'Aoste, dans le grand Hôtel Brusson, où plusieurs familles de la bourgeoisie se sont également réfugiées. Dans cet hôtel qui garde l'apparence d'un lieu de villégiature, les jeunes gens trompent le temps de l'attente et de l'inquiétude : ils s'amusent, se taquinent avec l'insouciance de leur âge, tombent amoureux, jouent au tennis - mais ils n'ont pas de chaussures et ils ont faim. Rosetta Loy a douze ans, elle est la cadette de deux soeurs et la plus jeune du groupe, les garçons n'ont d'yeux que pour ses soeurs. Tenue pour quantité négligeable, amoureuse d'un jeune garçon manchot qui ne lui prête pas attention, elle se sent à l'écart dugroupe, sur lequel elle porte un regard de témoin à la fois ingénu et douloureusement attentif.
Lorsque arrive la date du 8 septembre 43, l'écroulement du régime fasciste est une surprise. Pour chacun de ces jeunes gens, cela voudra dire l'entrée brutale dans la vie d'adulte : chacun devra choisir son camp, qu'il le veuille ou non. Celui qui est juif sera envoyé quelques mois après dans un camp et l'on perdra sa trace, un autre optera pour la fidélité à la "Patrie", c'est-à-dire au Duce, et rejoindra les rangs de la République de Salò, un autre encore choisira le camp "ennemi", celui des partisans qui ont pris le maquis.
Commencé avec légèreté sur l'évocation d'une chanson en vogue cet été-là, « Ay, Paloma », qu'un des jeunes gens ne cesse depasser sur son gramophone, le récit se clôt le 8 septembre sur cette même chanson : mais en un mois et une semaine, tout a basculé.
Des adolescents insouciants ont rencontré l'Histoire et plus rien, jamais, pour aucun d'eux, ne sera pareil.
Tissant avec simplicité la trame des images, des sensations qui enserrent les personnages dans les fils de l'Histoire et de leur proprehistoire, Rosetta Loy recompose ici à nouveau, à sa manière légère et subtile, la mémoire d'une certaine période de l'Italie que les Français généralement ignorent, et que les Italiens eux-mêmes commencent tout juste d'explorer.
Il y en a trois, des mains. La première est la plus belle, elle a entrelacé ses doigts aux miens, chaude, forte. Une main à la Michel-Ange, aux ongles bien dessinés. C'est une histoire uniquement de gestes où les paroles privées de sens sombrent dans le néant. Et le désir reste impossible à combler, enfantin et adulte à la fois comme s'ils appartenaient, ces gestes, à une petite fille mais aussi à son contraire. Une petite fille solitaire et qui a faim de gratifications, et une adulte ingénieuse, experte. Même les odeurs sont des vagues qui vont et viennent et portent en elles tendresse et ténèbres, les narines les suivent comme si elles marquaient une piste pour s'orienter dans cette forêt de silences. L'amour est au centre de ce récit. Paris, Rome, Venise, les années se superposent, mais le regard de la petite fille est le même que celui de la femme qu'elle est devenue. Si aiguisé, si précis, si intuitif, si vrai. Pour la première fois, Rosetta Loy, figure majeure de la littérature italienne contemporaine, publie en France un texte inédit dans sa langue maternelle. Elle peut enfin dire, en toute liberté, toutes les choses enfouies et les restituer dans l'éclat où elles lui sont apparues. Avec violence et nécessité, sans jamais tricher. Rosetta Loy signe ici un grand livre en tressant sa vie intime avec celle de l'Italie.
Madame amitz avait imaginé des " destins " pour ses filles, mais isabella est partie très jeune se marier à rome et margot vit encore dans la grande maison de famille, dans les montagnes suisses.
La vie amoureuse agitée et compliquée de cette grande bourgeoise catholique...aujourd'hui grand-mère, a laissé de nombreuses traces insidieuses et conflictuelles chez ses enfants naturels ou adoptifs. la seconde guerre mondiale et l'arrivée d'arturo jeune intellectuel juif ami d'isabella qui vient se réfugier dans la demeure familiale, transformeront les non-dits en guerre de religion, à l'échelle privée, mais qui peut être tout aussi sanguinaire.
En proie aux barbaries des terroristes, aux corruptions des politiques et à la terreur qu'exerce la mafia, le pays s'est laissé lentement sombrer dans un chaos contre lequel des juges intègres et des journalistes héroïques se sont révoltés, payant le plus souvent de leur vie leur courage. De l'attentat de la Banque de l'Agriculture de Milan, le 12 décembre 1969, à l'installation du parti néofasciste d'un entrepreneur triomphant, possesseur des médias, la romancière raconte à sa manière, rigoureuse, limpide, documentée, émouvante et scandalisée l'enchaînement des tragédies et le désarroi des observateurs. Bombes lancées aveuglément dans les lieux publics et les transports, acharnement contre les magistrats et les enquêteurs, chantage, enlèvements, élections truquées, partis crapuleux, suicides inexpliqués, meurtres cyniques : c'est un tableau noir que Rosetta Loy dresse ici.
La vie d'une famille de la haute bourgeoisie, en Italie, dans les années de la guerre et de l'après-guerre.
Le thème essentiel est celui de l'adolescence. Il est vrai que les personnages, adolescents au début, sont des hommes et des femmes à la fin. Nous saisissons le rythme rapide du temps, le brassage confus des heures et des saisons. Mais ces mêmes êtres, à la fin et bien des années plus tard, apparaissent étrangement identiques à ce qu'ils étaient quand nous les avons rencontrés...
1939. L'arrière -saison est belle. De grands bourgeois italiens profitent des dernières heures ensoleillées avant le déclin du jour. Ils ont de l'argent, une automobile avec chauffeur, des domestiques. Ils partent à Paris, à Vienne. Ils boivent du thé, jouent au tennis, écoutent Wagner sur un gramophone. Les journées sont paresseuses. L'humeur est langoureuse, vaguement inquiète.
Dans ses nouvelles Rosetta Loy livre des instantanés presque photographiques d'une société sur le point de disparaître. Nous sommes à ce moment qu'elle appelle « l'instant d'avant la grande nuit ».
Celle qui s'abattra sur l'Europe au cours de l'automne 1939.
Rome à la fin des années trente.
Des parents distants et sans tendresse, une éducation stricte sous la houlette de religieuses parfois cruelles poussent une petite fille - dont la solitude est terrifiante - vers la seule personne présente dans sa vie, sa gouvernante allemande, anne-marie. mais cet amour têtu et inconditionnel, comme seuls peuvent en éprouver les enfants, n'est pas réciproque. anne-marie ne ressent qu'indifférence, voire agacement, à son égard.
A travers le récit de cet attachement contrarié se glisse, insidieuse, l'histoire. au loin, les prémices de la guerre se font sentir. de l'autre côté de la rue, une famille juive vit ses derniers instants de bonheur simple sous les regards d'une petite héroïne fascinée et d'une jeune allemande à l'hostilité farouche. ainsi retrouve-t-on dans la porte de l'eau, publié une première fois en italie en 1976, les thèmes qui hanteront toute l'oeuvre de la romancière ; l'enfance innocente et capricieuse confrontée au monde des adultes et à l'histoire, celle de la seconde guerre mondiale.
Rosetta loy nous offre un chefs-d'oeuvre de subtilité et de poésie alliées à la précision de son écriture d'une beauté époustouflante.