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Martin Rueff
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Au bout de la langue est le premier essai philosophique de Martin Rueff aux éditions Nous. L'auteur expose dans ce livre une approche très personnelle de la langue, entendue dans tous les sens du mot, à la fois comme organe et comme capacité d'expression. En jouant avec la polysémie du terme, qui permet une appréhension à la fois physique, symbolique et philosophique de la langue, Martin Rueff propose un essai passionnant, à la fois érudit - riche d'exemples très variés provenant de traditions, d'époques et de langues différentes - et très facile d'accès, se démarquant par une grande clarté d'exposition et une adresse directe aux lecteurs. La transversalité de l'approche (phonologie, linguistique, philosophie, mythologie, poésie, physique) est portée et unifiée par une écriture prenante et un ton très libre, non dénué d'une forme de légèreté, voire d'humour.
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La jonction rassemble deux textes très différents par leur registre et leurs objets. Le livre conjoint le traitement du corps et du symbole, du mythe et du contemporain, il frappe surtout par la manière dont une érudition actualisée se donne de façon frontale, par une écriture directe et un renouvellement des enjeux.
La jonction unit deux textes sur lesquels Martin Rueff a longuement travaillé depuis 2008 : « L'Amer fait peau neuve » et « L'Enrouement d'Actéon ». Ce ne sont pas de parties thématiques, mais de « petits univers complets ». « L'Amer fait peau neuve » est une rêverie concertée sur le bleu et les bleus - le bleu du manteau de Marie qui a été utilisé pour le drapeau européen (l'affaire est insensée) ; le bleu de la mer méditerranéenne où s'achève un destin de l'Europe. Mais le poème dérive vers une autre forme de bleus - les hématomes, où la formation des bleus devient une allégorie de la formation (naturelle) des poèmes. « L'Enrouement d'Actéon » est une reprise du mythe d'Actéon, mais aussi une réinvention de la tradition de ses interprétations. Chaque figure du mythe a droit à son poème. C'est aussi un poème contre le devenir animal d'une certaine poétique contemporaine. « La voix animale est une possibilité du langage poétique, une fiction sensible qui est aussi une rêverie des limites. [...] Le poème est aussi un geste critique. »
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Foudroyante pitié ; Aristote avec Rousseau, Bassani avec Céline et Ungaretti
Martin Rueff
- Mimesis
- L'esprit Des Signes
- 27 Novembre 2018
- 9788869761713
L'évidence foudroyante de la pitié constitue l'objet de cet essai. De qui at- on pitié ? Quand ? Comment ? A quelle distance faut-il être de quelqu'un pour éprouver ce sentiment ? Doit-on connaître la peine qui l'afflige pour en être frappé ? La pitié a-t-elle quelque chose à voir avec l'expression de la souffrance ou avec son empêchement ? Et si oui, peut-on avoir pitié des animaux ? Ces questions quotidiennes, qui nous concernent tous, semblent avoir été écartées par la réflexion contemporaine qui préfère à la pitié toutes sortes de doubles dont elle tient à la distinguer : l'empathie (plus naturelle), la sympathie (plus universelle), le care (plus socio-politique). Et pourtant, la pitié résiste avec la force d'une évidence vécue.
Cette évidence foudroyante de la pitié constitue l'objet de cet essai. Pour l'aborder l'auteur a suivi des maîtres anciens : Aristote, Rousseau croisent ainsi Céline et Ungaretti. On se demande en passant si une histoire littéraire et philosophique de la pitié est possible.
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À coups redoublés ; anthropologie des passions et doctrine de l'expression chez Jean-Jacques Rousseau
Martin Rueff
- Mimesis
- L'esprit Des Signes
- 27 Novembre 2018
- 9788869761706
Selon Rousseau le langage n'est pas né pour dire le monde, mais pour dire l'amour. Au 18ème siècle, cette thèse originale déplace les lignes car elle met l'expression des affects au coeur de la communication : ce n'est pas pour assurer la référence que nous parlons mais pour instituer le monde de nos passions. C'est à suivre ce fil rouge qu'est consacrée cette étude. Il ne s'agit pas seulement de montrer qu'un tel fil permet de lire ensemble l'Essai sur l'origine des langues et le reste de l'oeuvre, ou qu'il traverse et unit les écrits du philosophe et ceux de l'écrivain. Il y a plus et plus important - là où Rousseau noue anthropologie des passions et doctrine de l'expression, un mystère quotidien nous attend. C'est celui par lequel ce que nous disons de ce que nous sentons ne se distingue plus en droit de ce que nous sentons. Un amour est comme un feu : s'il se déclare, il existe autrement. Il est plus vif, plus intense. Plus dangereux aussi.
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Icare crie dans un ciel de craie
Martin Rueff
- Belin
- L'extreme Contemporain
- 22 Janvier 2008
- 9782701145457
Alors que la longue tradition des icariens s'était concentrée sur la chute d'un fils, du ciel jusqu'à la vague, Icare crie dans un ciel de craie ralentit la descente et dédouble l'impact. L'auteur s'interroge attentivement sur les heures sous-marines du précipité pour écrire le poème des dernières heures d'Icare délirant sous les eaux. C'est un net progrès qui offre un document décisif pour la connaissance de la vie des noyés. Avec Icare c'est bien la génération des fils qui est visée. Que peuvent-ils retenir de leurs pères, ces fils du début du XXIe siècleoe Comment inventer, en langue de poète, une réflexion sur la transmission et ses conditionsoe Certes, Icare tombe plutôt mal, mais il aura au moins essayé de se forger un cri: un cri susceptible de faire entendre, dans son nom, un ciel de craie: " Icare qui voudrait votre beau nom tourner il trouverait craie, criez donc Icare, criez dans votre ciel de craie".
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Plus qu'un recueil de poésies, Comme si quelque est un livre de poésie. C'est un livre où la poésie a toute la place, mais aussi un livre où la poésie est l'enjeu d'un questionnement jamais apaisé : qu'est-ce que faire de la poésie ici, maintenant, en France, en 2005 ? Or il n'est désormais de réponse que dialectique : la poésie ne doit pas ignorer la transformation de la langue en marchandise et elle doit puiser dans son histoire les ressources de sa révolte intime.
L'auteur distribue ainsi ses doutes dans les poèmes, mais aussi entre les poèmes, dans des réflexions, parfois humoristiques et souvent amères, intitulées Les pleins et les déliés. La politique n'en est pas absente.
Chacune des trois sections du livre s'ouvre sur ces pensées détachantes. Les poèmes s'avancent alors en trois vagues qui se recouvrent et se libèrent : la poésie amoureuse, la poésie naturelle et le chant des morts. Entre chaque section, l'ordre du recouvrement n'est pas identique et parfois c'est le lyrisme amoureux qui vient avant celui des morts, d'autres fois c'est l'inverse. Il arrive que ces voix convergent en une seule plainte.
Accueillante et adressée, la poésie qui s'écrit sur les bords se dit en plusieurs langues et l'on trouvera dans le recueil des poèmes écrits directement en italien. Ils forment parfois un cycle. Un long poème conclut cette architecture mobile : Corde raide. S'il est bon que le lecteur se sente parfois perdu, il n'est jamais abandonné car l'auteur le précède dans sa perte et l'escorte jusqu'au bout.
Comme si quelque n'est pas simplement un livre de poésie moderne, c'est un livre qui demande, par tous les moyens, que le lecteur se pose aujourd'hui la question de la poésie. Il est considéré qu'il n'est nul besoin de hurler pour se faire entendre. D'où le titre, qui laisse l'initiative au lecteur, comme une formule à achever, à relancer, à aimer - comme si quelque.
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En mai 2006, des écrivains, des poètes, des philosophes et des critiques se sont retrouvés à Cerisy pour travailler en compagnie de Michel Deguy sous la bannière de «l'allégresse pensive» empruntée à Milton.
Au fil des interventions et des conversations, une réflexion collective s'est construite qui prenait son départ dans les poèmes et les thèses théoriques d'un poète influent qui refuse qu'on sépare l'acte de création de l'instance critique. En effet, au-delà des lieux communs de plus en plus fréquents sur poésie et philosophie, au-delà de la reprise de ces thèmes par la vulgate, la poésie comme la poétique de Michel Deguy sont en pensée. Elles sont de la pensée, elles sont pour la pensée, elles sont en pensée. Elles définissent un «régime» de la pensée. D'où une série de questions:
Si le poème pense, comment penser en poèmeoe Quels sont alors les effets de la pensée sur le poème et du poème sur la penséeoe Et comment penser les rapports d'une poésie pensive et de la poétiqueoe Si la poésie n'est pas seule, quels sont ses liens avec les autres artsoe Qu'en est-il du poème à l'ère du «culturel»oe Comment l'écrire et comment le lireoe Si la poésie enfin a rapport avec la croyance, comment dire le rapport de la croyance poétique et du «sans retour» si l'on désigne par là le mouvement de sortie du religieuxoe
Les interventions du colloque sont exposées selon l'ordre des raisons. Elles sont précédées d'un récit: L'Hexaméron à l'endroit.
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