Comment écrire l'histoire des marges ? Cette question traverse l'oeuvre de Michel de Certeau, dans sa dimension théorique, mais aussi pratique : Certeau ne s'installe en effet dans aucune discipline, et aborde chaque domaine en transfuge, tandis que son principal objet d'étude est la façon dont un désir fait face à l'institution. À un moment où, tant historiquement que politiquement, la politique des marges semble avoir été effacée par le capitalisme mondialisé, l'essor des géants du numérique et toutes les formes de contrôle qui en résultent, il est particulièrement intéressant de se demander où sont passées les marges, comment les penser, et en quel sens leur expérience est encore possible. Ce dossier, coordonné par Guillaume Le Blanc, propose d'aborder ces questions en parcourant l'oeuvre de Michel de Certeau, afin de faire voir les vertus créatrices et critiques que recèlent les marges. À lire aussi dans ce numéro : La société française s'est-elle droitisée ?, les partis-mouvements, le populisme chrétien, l'internement des Ouïghours, le pacte de Glasgow, le tombeau de Proust et se donner du temps à Fontainhas.
Comment est-on passé, en quelques décennies, d'une Pologne exemplaire, européenne, aux intellectuels brillants (Geremek, Michnik, etc.), à une Pologne nationaliste, euro-sceptique , anti migrants qui remet en cause l'État de droit ?
Le dossier rendra compte des débats d'idées en Pologne aujourd'hui, notamment ceux qu'animent des intellectuels ou des acteurs sociaux de la nouvelle génération. Il s'agit de mettre en valeur tant ce qui relève de la spécificité d'une histoire longue (place de l'Église, mémoire de la guerre et de la Shoah) que du bilan contrasté des trente dernières années (transition démocratique, politiques européennes, mouvements de femmes). Après tout, ce que nous constatons dans ce « jeune » État membre européen a préfiguré, à bien des égards, les évolutions politiques en Autriche, en Italie, au Royaume Uni ou en Suède, qui ne sont pas d'anciens pays communistes « de l'Est ».
Le dossier, coordonné par Anne-Lorraine Bujon et Isabelle de Mecquenem, remet le sens de l'école sur le métier. Il souligne les paradoxes de « l'école de la confiance », rappelle l'universalité de l'aventure du sens, insiste sur la mutation numérique, les images et les génocides comme nouveaux objets d'apprentissage, et donne la parole aux enseignants. À lire aussi dans ce numéro : un inédit de Paul Ricoeur sur la fin du théologico-politique, un article sur les restes humains en archéologie et un plaidoyer pour une histoire universaliste.
L'anthropologie du don de Marcel Hénaff, ainsi que son éthique de l'altérité et sa politique de la reconnaissance, permettent de penser les limites de la marchandisation, le lien entre les générations et les transformations urbaines. À lire aussi dans ce numéro : l'image selon Georges Didi-Huberman, l'enseignement de la littérature, la neuropédagogie, l'invention de l'hindouisme, l'urgence écologique et la forme poétique de Christian Prigent.
Ces dernières années ont vu émerger la vague #MeToo, ainsi que des figures féminines importantes dans les soulèvements populaires à travers le monde.
L'expérience des femmes aujourd'hui, issue d'une histoire sensiblement différente de celle des hommes (et irréductible à la domination masculine) a radicalement transformé la conscience collective durant les dernières décennies.
Comment vivent les femmes aujourd'hui ? Avec les contributions d'Anne Dujin, Camille Froidevaux-Mettrie, Véronique Nahoum-Grappe, Joël Hubrecht, Ivan Jablonka, Geneviève Fraisse...
La crise des Gilets jaunes a mis en lumière un rapport contradictoire des Français à leur État : au rejet des élites politiques et des hauts fonctionnaires se superpose un sentiment d'abandon et une demande d'État, ou en tout cas de services publics. La réponse, pour l'instant, est venue sous la forme d'une réaffirmation des prérogatives « régaliennes » de l'État, mais aussi de projets de « transformation de l'action publique » censé rendre l'État plus agile, moins coûteux et le rapprocher de la société. Ces projets de réforme réveillent un vieux fonds culturel qui fait de l'État français, centralisé et autoritaire, l'héritier de l'absolutisme, mais ils portent aussi la marque de l'idéologie néo-libérale qui promeut « la raison du moindre État ». Comment comprendre ces contradictions? Voulons nous encore, en France, faire le choix de l'État? Quel rôle et quel sens souhaitons nous lui donner? Avec des textes d'Antoine Garapon, Lucile Schmid, Philippe Bezes et Sebastian Roché.
Nos attentes à l'égard de la littérature ont changé. Autant qu'une expérience esthétique, nous y cherchons aujourd'hui des ressources pour comprendre le monde contemporain, voire le transformer. En témoigne l'importance prise par les enjeux d'écologie, de féminisme ou de dénonciation des inégalités dans la littérature de ce début du XXIe siècle, qui prend des formes renouvelées : le « roman à thèse » laisse volontiers place à une littérature de témoignage ou d'enquête. Ce dossier, coordonné par Anne Dujin et Alexandre Gefen, explore cette réarticulation de la littérature avec les questions morales et politiques, qui interroge à la fois le statut de l'écrivain aujourd'hui, les frontières de la littérature, la manière dont nous en jugeons et ce que nous en attendons. Avec des textes de Felwine Sarr, Gisèle Sapiro, Jean-Claude Pinson, Alice Zeniter, François Bon.
Ce dossier, coordonné par Camille Riquier, dans la cuisine de l'argent, afin de rendre visible ce qui reste invisible : « l'argent est d'autant plus maître qu'il est invisible » (Péguy). Il s'agit faire l'histoire de la dématérialisation de la monnaie, de comprendre notre aveuglement devant la crise de 2008, et de poser la question d'une politique de la dette. Avec les contributions de Dominique Ancelet-Netter, Michaël Foessel, Thomas Piketty, Christian Chavagneux, André Orléan, David Graeber, François Ewald et Jean-Pierre Dupuy.
Source d'inquiétude autant que de fascination, la Chine continue de représenter une énigme. Le socialisme « aux couleurs de la Chine » conjugue en effet un capitalisme sauvage avec un pouvoir centralisé dans une synthèse politique inédite. Le dossier explore le nouveau souverainisme, le pouvoir numérique, le rapport aux minorités et la gestion de l'épidémie. À lire aussi : projet de danger perpétuel, du fanatisme à la radicalité, la dissidence discrète de Marc Fumaroli, pour une philosophie de la préhistoire et la controverse Kundera.
Montée des autoritarismes, fragilisation de l'adhésion aux institutions démocratiques, exacerbation des inégalités et colères populaires, toutes ces tendances ont contribué à profondément affaiblir le libéralisme politique.
Rarement défini et souvent décrié, régulièrement associé au néolibéralisme ou au capitalisme, le libéralisme politique continue pourtant de représenter un ensemble de valeurs et d'institutions indispensables à la protection des libertés publiques et des droits individuels dans les sociétés démocratiques. Quel peut être son avenir aujourd'hui, et comment faut-il le repenser pour qu'il tienne ses promesses ? C'est à cette question que s'attachera le dossier de ce numéro. Avec des textes de Timothy Garton Ash, Jan-Werner Müller et Pierre Grosser.
On assiste aujourd'hui à une demande de souveraineté, qui vient à la fois de gauche et de droite, avec des présupposés différents sur les acteurs ou les phénomènes qui nous auraient fait perdre de la souveraineté. Poussée dans ses retranchements, cette demande verse dans le souverainisme, sous la forme d'un rejet de l'Union européenne. Mais la question de la souveraineté est-elle correctement formulée ? Qui peut réellement être souverain aujourd'hui - le peuple, l'individu, la nation ? Le dossier de ce numéro, coordonné par Jean-Yves Pranchère, tentera d'approfondir ces questions en identifiant quels sont les enjeux-clés pour reconstruire la puissance publique et « reprendre le contrôle » sur nos destins collectifs. Avec des textes de Céline Spector, Jean-Yves Pranchère et Jean-Claude Monod.
Il n'y a plus de valeurs, on ne croit plus en rien. Notre époque serait-elle nihiliste ? Ce numéro spécial explore une notion philosophique, son histoire, son actualité dans des domaines divers (économie, religion, politique, art), notion qui nous permet
Présentation de la revue :
Fondée en 1932 par Emmanuel Mounier, la revue Esprit continue d'orienter ses lecteurs dans les débats du temps, poursuit son enquête sur la forme de vie démocratique et maintient son engagement en faveur de la justice. Personnaliste à ses origines, la revue a participé aux luttes anticoloniales, accompagné l'expérience de la « deuxième gauche » et mené le combat antitotalitaire. Université sauvage, elle réunit ceux qui cherchent à proposer à un public large un éclairage critique de notre modernité. Chaque numéro est composé d'un éditorial, d'un journal « à plusieurs voix » sur l'actualité politique internationale, d'un dossier thématique, d'articles divers, et de recensions de l'actualité culturelle et éditoriale. Indépendante, ouverte sur le monde et engagée dans la cité, la revue est aujourd'hui codirigée par Antoine Garapon et Jean-Louis Schlegel.
Présentation du numéro 428 :
En pleine campagne présidentielle outre-Atlantique, Esprit s'intéresse à la disparition des classes moyennes aux États-Unis, et de l'imaginaire démocratique qui leur est lié. La campagne présidentielle montre le visage d'un pays où les inégalités économiques se creusent, où les différentes catégories de populations se replient sur leur identité culturelle et où le pouvoir et l'argent sont toujours plus concentrés. Cette dynamique de fragmentation sociale et de polarisation politique affecte le « rêve américain » : les Etats-Unis fabriquent-ils encore des modes de vie démocratiques permettant à l'Amérique de faire monde ?
La question ici serait moins d'interroger les marges que le noyau dur du pays et de dresser un panorama: classes moyennes, compromis fordiste, esprit civique, idéologie de la technologie et du progrès: quelles références culturelles pour quelle société aujourd'hui ?
Présentation de la revue :
Fondée en 1932 par Emmanuel Mounier, la revue Esprit continue d'orienter ses lecteurs dans les débats du temps, poursuit son enquête sur la forme de vie démocratique et maintient son engagement en faveur de la justice. Personnaliste à ses origines, la revue a participé aux luttes anticoloniales, accompagné l'expérience de la « deuxième gauche » et mené le combat antitotalitaire. Université sauvage, elle réunit ceux qui cherchent à proposer à un public large un éclairage critique de notre modernité. Chaque numéro est composé d'un éditorial, d'un journal « à plusieurs voix » sur l'actualité politique internationale, d'un dossier thématique, d'articles divers, et de recensions de l'actualité culturelle et éditoriale. Indépendante, ouverte sur le monde et engagée dans la cité, la revue est aujourd'hui codirigée par Antoine Garapon et Jean-Louis Schlegel.
Présentation du numéro 429 :
Tandis qu'elles devraient garantir l'affirmation des valeurs républicaines, les prisons sont devenues les lieux du plus grand danger pour la République. En effet, au travers d'une inversion de la logique foucaldienne selon laquelle les prisons criminalisaient les opposants politiques, celles-ci en viennent aujourd'hui à politiser les criminels et relègue le paradigme de la dignité de l'homme en fin de parcours. Reste à penser le sens de la peine par le biais d'une enquête auprès des détenus, des familles et des assistants sociaux ainsi qu'en prêtant attention au cas particulier des centres de rétention administrative.
Fondée en 1932 par Emmanuel Mounier, la revue Esprit continue d'orienter ses lecteurs dans les débats du temps, poursuit son enquête sur la forme de vie démocratique et maintient son engagement en faveur de la justice. Personnaliste à ses origines, la revue a participé aux luttes anticoloniales, accompagné l'expérience de la « deuxième gauche » et mené le combat antitotalitaire. Université sauvage, elle réunit ceux qui cherchent à proposer à un public large un éclairage critique de notre modernité. Chaque numéro est composé d'un éditorial, d'un journal « à plusieurs voix » sur l'actualité politique internationale, d'un dossier thématique, d'articles divers, et de recensions de l'actualité culturelle et éditoriale. Indépendante, ouverte sur le monde et engagée dans la cité, la revue est aujourd'hui dirigée par Antoine Garapon et Jean-Louis Schlegel.